Le miroir de l'âme

Petit écrit, à vous de faire la part des choses et peut-être déterminer s'il s'agit de la réalité ou d'une fiction ;)

Mettons nous tout d'abord en scène. Nous sommes jeudi 3 mars 2005, jeudi presque comme les autres jeudi, sauf qu'il est consécutif à une mauvaise nouvelle, qu'il comporte une chute de neige sans répit depuis le petit matin et une grève des transports en commun d'Ile de France. Le décor est planté.

Parti plus tôt de mon bureau pour tenter de rentrer à une heure décente, pour cause de grève, je me hâte vers la gare de Lyon à Paris. Une fois à bord de mon train, je me cale soigneusement à côté de voyageurs pour le moins bruyants. Peu importe, je fais le vide dans ma tête, me met en mode "autiste" et décide de poursuivre mon dernier roman

Départ du train, les voisins toujours aussi bruyants avec leur téléphone portable. Arrivé à l'air libre, la luminosité ambiante m'intrigue et me pousse à lever la tête de mon livre. J'aime la neige, surtout quand je suis au chaud...

Coup d'oeil circulaire, histoire de voir qui se trouve dans la même galère de transports que moi. Un regard m'interpelle. Sans tomber dans la vantardise, il arrive qu'on me regarde, les demoiselles j'entends. Pas souvent, mais cela n'a pas trait au miracle non plus.

Echange de regard courtois avec la dite demoiselle, et détaillage rapide. Cette jolie brune a décidément de quoi me plaire. Simple, une légère touche de maquillage tout aussi discret. Je perçois la timidité dans son regard. Décidant de ne pas l'importuner plus longtemps je replonge dans ma lecture...

Les gares défilent le long de mon trajet, les kilomètres passent et me séparent de ma longue journée de labeur. Les pages défilent elles aussi. Toujours plus loin dans l'intrigue, je veux découvrir la clef du mystère. Cependant, je ne peux m'empêcher de repenser à la gente demoiselle assise quelques rangées plus loin. Une question me taraude au fur et à mesure de ma lecture : me regarde-t-elle encore ?

Discrètement, mais avec assurance tout de même, je décide de la regarder. Surprise, son joli visage est tourné vers moi, et ses yeux cherchent les miens. Les minutes s'écoulent, les gens désertent le wagon. Je constate avec joie qu'elle ne descend toujours pas, préservant ainsi mon bonheur égoïste de pouvoir lui jeter d'autres petits regards. Les pages se suivent, mais je dois avouer que plus les minutes s'égrennent, moins j'arrive à me focaliser uniquement sur la lecture.

Mon trajet arrive bientôt à sa fin. Prochain arrêt, le terminus, ma ville. Reste une poignée d'âmes dans le wagon, dont la charmante jeune femme. Le train ralenti, tout le monde rassemble ses effets personnels. J'en fait de même. Relevant machinalement la tête, je recroise ce regard délicieux. Echange de regards prolongé cette fois. On dit des yeux qu'ils sont le miroir de l'âme, et j'ai tendance à adhérer à cette affirmation. Dans l'essence même ce son regard, je ressens comme une invitation. Une invitation pressante même, que l'on pourrait traduire par "Viens donc me parler, j'aimerais faire ta connaissance..."

Surpris plus qu'autre chose par l'insistance de la demoiselle, je ne bouge pas. Non pas tétanisé, mais perplexe, tiraillé entre deux camps : aller lui parler, provoquer le destin et pourquoi pas, rencontrer une personne agréable et d'un autre côté, ne pas bouger, ne pas faire le premier pas, et laisser passer cet instant et surtout ne pas le gâcher par une approche maladroite et vouée à l'échec.

Terminus, tout le monde descend. Une fois dehors, j'ose me retourner pour voir si elle est toujours présente près de moi. On ne peut plus présente d'ailleurs, puisqu'elle est juste derrière moi. J'avance d'un pas nonchalant, mais volontairement ralenti. Elle arrive à mes côtés, me regarde avec persuasion, puis me dépasse... Doucement, très lentement, comme si, elle aussi, voulait prolonger cet instant de bonheur égoïste.

Quelques mètres, quelques pas, nos chemins se séparent. Je retourne affronter le froid et la neige, alors qu'elle se réfugie dans le hall de la gare. La neige cingle mon visage, le vent me traversant, faisant fi de mon manteau. Le bruit de mes pas faisant craquer la neige me laisse songeur. Il suffit de peu, un regard, pour faire passer une émotion. Les pensées se succèdent rapidement dans mon esprit; pourquoi ne pas avoir été la voir ? A ceux qui seraient tentés de me poser la question, je leur répondrais simplement qu'avant de trouver quelqu'un, il faut d'abord se trouver soi-même. Ceci dit, même au chaud maintenant, en repensant à ces instants, j'en tremble encore, et ce n'est sûrement pas de froid...

Publié le :
03/03/2005
Dans la catégorie :
Auteur :
Mathieu LESNIAK
Mathieu LESNIAK
Commentaires :
Sapho
Sapho
MAIS!
03/03/2005 23:24:02
loranger
loranger
Ouaip, pareil... En espérant qu'elle te lise. =)
04/03/2005 09:50:38
Mathieu
Mathieu
Jessy > Mais quoi ?
Loranger > Ca se pourrait, on peut utopiser ;)
04/03/2005 11:42:07
Flytox
Flytox
Brassens a du avoir une vision du futur te concernant quand il a écrit "les passantes" ;-)
04/03/2005 13:37:42
Flytox
Flytox
Rectificatif, le texte est un poème d'Antoine Pol.
04/03/2005 13:54:14
loranger
loranger
Je crois même que ses amis (des petits rigolos) le surnommaient "Pau".
04/03/2005 17:11:48
Sapho
Sapho
"MAIS!" tu sais déjà ce que j'en pense ;-)
06/03/2005 14:11:49
Articles similaires :
Pas d'articles similaires